21 décembre 2023
Inondation en Gironde
Thierry Degen - Terra
Le 14 novembre 2023, le Cerema a organisé une conférence territoriale sur le risque ruissellement. Cette conférence a permis d’actualiser les modèles existants pour améliorer la connaissance de l’aléa et de mettre en lumière des retours d’expérience sur des évènements d’inondations par ruissellement et les actions à mettre en œuvre.

L’ouverture de la conférence par Fabrice Marie du Cerema a permis de montrer que le ruissellement est un sujet complexe à la croisée de plusieurs politiques publiques : 

  • Complexe à modéliser et caractériser,
  • Complexe à traduire dans les documents de planification.

Parmi tous les risques liés à l’eau, le risque ruissellement est particulièrement impacté par le changement climatique qui se manifeste par des événements pluvieux de plus en plus intenses et violents. Le risque ruissellement vient aussi interroger directement le développement de l’urbanisation, l’imperméabilisation, l’évolution de la structuration du parcellaire et des pratiques agricoles qui contribuent souvent à accentuer l’importance et les conséquences des phénomènes.

En introduction, Pierre-Paul Gabrielli de la Dreal Nouvelle Aquitaine a rappelé l’impact du risque ruissellement en Nouvelle Aquitaine. Le phénomène d’inondations par ruissellement affecte plus de personnes en Nouvelle Aquitaine que les inondations par débordement de cours d’eau ; cela représente 930 000 personnes exposées au risque ruissellement dans la région. 

Par ailleurs, le phénomène d’inondation par ruissellement représente un aléa très diffus sur le territoire par rapport au risque d’inondation par débordement de cours d’eau. Une étude de 290 communes ayant déclaré un sinistre CATNAT a été réalisée mettant en lumière 82 communes ayant déclaré plusieurs sinistres et 19 communes n’ayant pas de PPR inondation ou submersion.

 

La présentation :

Approches innovantes de cartographie de l'aléa ruissellement

Rémy Gasset, Claire Fraisse et Stéphanie Souvignet - Cerema

Exzeco et CRUS sont deux méthodes dites sèches permettant d’avoir une première approche de l’aléa ruissellement à partir du MNT. A l’origine l'outil EXZECO a été conçu pour pallier à un défaut de connaissance sur les têtes de bassins versants. 

Dans le cadre de CRUS, quatre cartes sont croisées et combinées par coefficient de pondération pour élaborer la cartographie : 

  • carte de battance, 
  • carte de perméabilité, 
  • carte des pentes, 
  • carte d’occupation des sols. 

Pour être plus précis et définir des informations de hauteurs et de vitesses, la modélisation 2D avec Telemac est utilisée. L’un des bénéficiaires de la cartographie Télémac, la communauté de communes Convergence Garonne, souhaite intégrer la prise en compte du risque ruissellement dans sa démarche PLUi en croisant la carte d’aléa aux enjeux du territoire.

 

La présentation :

Cartographie des chemins d’écoulement des eaux : du diagnostic à la stratégie

Yannick Coulaud CAUE Dordogne

La cartographie d’écoulements des eaux, obtenue notamment grâce à Exzeco, est utilisée sur le département de la Dordogne pour différents objectifs. Elle a d’abord été utilisée pour dresser un pré-diagnostic partagé des zones humides (délimitation et validation des zones humides). Par ailleurs, elle permet de mieux comprendre le fonctionnement de l’hydrosystème communal afin d’appréhender les enjeux potentiels liés à l’aménagement du territoire. Elle sert de base à une détermination plus précise des fonctions des zones humides discutées notamment dans le cadre d’ateliers participatifs. 

Enfin, la cartographie est utilisée pour mieux comprendre le fonctionnement des écoulements de sous bassins versants afin de proposer des solutions fondées sur la nature dans un contexte de changement climatique, notamment des stratégies de plantations de haies, préservation des zones humides,...

La présentation :

Ruissellement en landes de Gascogne : "entre remontée de nappe et débordement de cours d’eau, retour d’expérience sur le village de Trensacq"

Laurent Degrave PNR Landes de Gascogne

Le PNR des Landes de Gascogne regroupe 52 communes et s’étend sur plus de 336000 hectares. Ce territoire a engagé une démarche d’expertises locales et partagées sur des phénomènes d’inondation par ruissellement et remontées de nappes, ayant eu lieu en 2020 et début 2021. Ces inondations s’expliquent par les conditions climatiques avec des pluies intenses (>10 mm/h). Les parcelles ont été historiquement morcelées avec installation de cultures telles que le Maïs. Par ailleurs, sur certains secteurs la nappe est affleurante, à moins de 50 cm de la surface du sol. 

A cela se rajoute la mise en place de petits merlons séparant les parcelles ce qui bloque les écoulements. D’autres facteurs aggravant le ruissellement ont été détectés tels que l’artificialisation des sols l’imperméabilisation, des sillons de plantation des pins,... Enfin suite aux incendies de 2022, on observe un déficit d’absorption des sols dus à la disparition des pins maritimes. En termes de solutions possibles pour freiner le risque ruissellement, des jardins de pluie dans les propriétés sont mis en place ainsi que des batardeaux pour détourner les eaux de ruissellement.

La présentation :

Pour une gestion des eaux pluviales à l’échelle des sous-bassins en voie d’urbanisation sur le bassin Hers Girou

Sylvain Macé Syndicat du bassin Hers Girou

Le territoire marqué par un chevelu de cours d’eau très dense  (au moins 2000 km) présente des reliefs marqués avec des orages de printemps qui provoquent des coulées de boues. Il est observé des phénomènes d’urbanisation intensive qui modifient l’hydrologie des cours d’eau et provoquent des incisions des cours d’eau avec des profondeurs de 3 mètres parfois. Une autre conséquence est celle de la saturation des réseaux des eaux pluviales (certains cours d’eau sont donc busés).

Le SAGE volet eaux pluviales, préconise de faire des études à l’échelle des 60 sous-bassins de ce territoire pour offrir une maitrise efficace et intégrée du risque ruissellement. Il y a 19 dispositions dans ce SAGE pour la bonne atteinte de cet objectif de maîtrise. Le syndicat a souhaité rendre les mesures du SAGE plus accessibles à l’attention des élus en dégageant les actions phares. 

En 2020, une étude hydraulique a été engagée pour évaluer la sensibilité du territoire au ruissellement avec une identification des secteurs propices aux phénomènes de production, transfert et accumulation du ruissellement. Par ailleurs, localement des ateliers participatifs sont mis en place pour identifier les actions potentielles afin de limiter l’imperméabilisation du territoire.

La présentation :

Conclusion 

Fabrice Marie Cerema

La conférence a permis de dresser un panorama sur le risque ruissellement et d’actualiser les connaissances : 

  • Le ruissellement est un risque majeur au regard des chiffres de la sinistralité au niveau national et régional. C’est un risque diffus et évolutif avec le changement climatique, peu ou pas intégré dans les documents de planification.
  • Des méthodes innovantes pour cartographier l’aléa ruissellement sont désormais disponibles mais la qualité des données d’entrée est déterminante ; le calage des modèles et le choix des hypothèses de pluies à prendre en compte reste complexe, nécessitant de rester conscient des limites de la modélisation.
  • Pour autant, la cartographie de l’aléa ruissellement permet de passer à l’action : faire de la pédagogie, sensibiliser, comprendre voire alerter, modifier les pratiques, préserver ou restaurer,…Les retours d’expérience de prise en compte de ce risque et de mise en œuvre d’actions pour le réduire et s’y préparer le montrent bien.
  • Il est enfin fondamental d’essayer d’agir à la source plutôt que de palier aux conséquences. Tout le monde est concerné, aussi bien en milieu rural qu’urbain.